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Quelle est la loi nationale applicable?

Gibraltar
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Réseau judiciaire européen (en matière civile et commerciale)

1 Les sources du droit positif

1.1 Le droit interne

À Gibraltar, les règles de conflit de lois concernant le droit applicable découlent aujourd’hui principalement des règlements de l’UE directement applicables. En matière civile et commerciale, il s’agit: du règlement (CE) nº 593/2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) et du règlement (CE) nº 864/2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (Rome II). La loi sur les contrats (loi applicable) [Contracts (Applicable Law) Act] (qui a mis en œuvre la convention de Rome de 1980) demeure applicable aux contrats entrés en vigueur avant le 17 décembre 2009 (le règlement Rome I s’applique aux contrats entrés en vigueur à cette date ou après celle-ci). Le règlement s’applique aux cas dans lesquels le dommage est survenu après le 11 janvier 2009. Les règles traditionnelles de la common law demeurent applicables au délit de diffamation, ainsi que concernant le droit patrimonial et successoral. Par exemple, la loi sur les contrats (loi applicable) donne effet à la convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles.

En matière familiale, c’est généralement la common law qui constitue la source normative sur la loi applicable, à quelques exceptions près. Le droit de Gibraltar est généralement appliqué en matière familiale, sauf exceptions limitées dans la common law (par exemple, en ce qui concerne la nullité du mariage) ou dans le droit écrit {par exemple, en ce qui concerne les obligations alimentaires en vertu de la loi sur les jugements rendus en matière d’obligations alimentaires (moyens d’exécution) [Maintenance Orders (Facilities for Enforcement) Act] et de la loi sur les jugements rendus en matière d’obligations alimentaires (exécution réciproque) [Maintenance Orders (Reciprocal Enforcement) Act]}. Dans les questions relatives à la responsabilité parentale et à la protection de l’enfance couvertes par le règlement (UE) nº 2201/2003 et par la convention de La Haye du 19 octobre 1996, ce sont les règles de 2011 sur la procédure familiale (enfants) (convention de La Haye de 1996) et l’article 15 de la convention de 1996 qui contiennent respectivement les règles en matière de loi applicable, à savoir que le droit de Gibraltar s’applique, sauf exceptions limitées.

Les sources des règles de conflit de lois à Gibraltar sont le droit écrit et la common law (jurisprudence), et le poids de chacune de ces sources varie dans chaque domaine du droit. Par exemple, le choix de la loi dans le contrat est aujourd’hui régi par la loi sur les contrats (loi applicable). Par ailleurs, il convient de noter que certaines de ces lois donnent effet aux accords internationaux (de tels accords, autres que la législation de l’UE directement applicable, requièrent une loi pour prendre effet au Royaume-Uni et, par extension, à Gibraltar). Par exemple, la loi sur les contrats (loi applicable) donne effet à la convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles.

1.2 Les conventions multilatérales en vigueur

Convention de La Haye de 1961 sur les conflits de lois en matière de forme des dispositions testamentaires, étendue à Gibraltar en 1964.

Convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, étendue à Gibraltar en 1994 (remplacée par le règlement Rome I en ce qui concerne les contrats entrés en vigueur le 17 décembre 2009 ou après cette date).

Convention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, étendue à Gibraltar en 1989.

1.3 Les principales conventions bilatérales

À notre connaissance, il n’existe aucune convention bilatérale contenant des dispositions en matière de choix de loi à laquelle le Royaume-Uni serait partie.

Toutefois, il convient de noter que, bien que la convention de Rome de 1980 et les conventions de La Haye autorisent un État à appliquer un autre régime de choix de loi aux conflits «internes» (tels que les conflits entre les lois d’Angleterre et du pays de Galles et celles d’Écosse), le Royaume-Uni a décidé de ne pas recourir à cette option. Par conséquent, les règles de la convention de Rome (en ce qui concerne les contrats entrés en vigueur avant le 17 décembre 2009) et des conventions de La Haye s’appliquent aux conflits entre les différentes juridictions du Royaume-Uni, ainsi qu’aux conflits internationaux.

2 La mise en œuvre de la règle de conflit

2.1 L’application d’office de la règle de conflit de lois

Il est généralement admis que les règles de conflit de lois ne s’appliquent que si au moins une des parties se prévaut de leur application. Dans le cas contraire, ou s’il n’existe aucune preuve satisfaisante du contenu du droit étranger, le juge appliquera généralement le droit de Gibraltar à la question. Cette règle concerne la preuve et la procédure et n’est donc pas affectée par les règlements de l’UE, la convention de Rome de 1980, etc.

2.2 Le renvoi

Les règlements de l’UE excluent l’application de la doctrine du renvoi dans les cas soumis aux règles de conflit de lois de l’UE. Cette approche prévaut également dans la loi sur les contrats (loi applicable). Par conséquent, si la règle de conflit de lois de Gibraltar applicable à un délit de négligence renvoie au droit français, le droit interne français s’appliquera, même si un tribunal français aurait appliqué le droit d’un autre pays. L’une des justifications avancées concernant le rejet du renvoi dans ces domaines semble être que les règles complexes établies par la législation auraient été bouleversées en cas d’application du renvoi.

Le rôle du renvoi dans les autres domaines du droit est aujourd’hui quelque peu limité et, dans certains cas, n’est pas complètement défini. On peut dire que le renvoi s’appliquera dans le cas de terrains situés à l’étranger, pour lesquels le droit de Gibraltar applique la loi du lieu de situation. Dans de tels cas, il existe un désir pragmatique d’appliquer le même droit que celui du tribunal dans le ressort duquel le bien est situé, afin d’accroître les chances qu'une décision rendue à Gibraltar concernant ce bien produise des effets. Le poids des décisions des juridictions de première instance, en ce qui concerne les biens meubles corporels situés à l’étranger, se traduit par l’exclusion du renvoi dans toute référence à la loi du lieu de situation.

En matière familiale, il existe une jurisprudence limitée selon laquelle la doctrine du renvoi peut s’appliquer dans certaines circonstances.

Il convient toutefois de noter que, dans de nombreux cas, la production d’éléments prouvant le contenu de règles de conflit de lois étrangères est onéreuse, raison pour laquelle les parties décident souvent de ne pas demander leur application (voir le paragraphe 2.1 ci-dessus). L’application du renvoi a fait l’objet d’un débat théorique intense. L’approche dominante dans la législation concernant les conflits de lois consiste à rejeter le renvoi. Par conséquent, si la règle de conflit de lois de Gibraltar applicable à un délit de négligence renvoie au droit français, le droit interne français s’appliquera, même si un tribunal français aurait appliqué le droit d’un autre pays. L’une des justifications avancées concernant le rejet du renvoi dans ces domaines semble être que les règles complexes établies par la législation auraient été bouleversées en cas d’application du renvoi.

Toutefois, le renvoi semble s’appliquer dans le cas des successions mobilières et immobilières, et des éventuels transferts de tels biens en général, lorsque les règles de choix de loi de Gibraltar renvoient à la loi du domicile ou à la loi du lieu où les biens immeubles sont situés, ainsi que dans le droit de la famille (qui renvoie à la loi du domicile). Dans de tels cas, il existe un désir pragmatique d’appliquer le même droit que celui du tribunal dans le ressort duquel le bien est situé, afin d’accroître les chances qu'une décision rendue à Gibraltar concernant ce bien produise des effets. Il convient toutefois de noter que, dans de nombreux cas, la production d’éléments prouvant le contenu de règles de conflit de lois étrangères est onéreuse, raison pour laquelle les parties décident souvent de ne pas demander leur application (voir le paragraphe 2.1 ci-dessus).

2.3 Le conflit mobile

Ce problème est résolu en précisant dans chaque règle de conflit de lois le moment pertinent auquel le facteur de rattachement est déterminé. Par exemple, dans le cas du transfert de biens meubles, la loi applicable est celle du lieu où le bien meuble en cause se trouve au moment du transfert, lorsque la loi applicable est présumée avoir affecté la propriété de ce bien.

2.4 Les exceptions au jeu des règles de conflit

En vertu des règles traditionnelles, les tribunaux de Gibraltar peuvent refuser d’appliquer une législation étrangère qui est contraire à l’ordre public de Gibraltar. Toutefois, le seuil est très élevé: par exemple, lorsque cela donnerait lieu à un résultat «totalement étranger aux exigences fondamentales de la justice telle que rendue par un tribunal de Gibraltar». Le contenu de l’ordre public de Gibraltar est influencé par les obligations internationales du Royaume-Uni, en particulier par la Convention européenne des droits de l’homme; un exemple bien connu d’exception d’ordre public est celui des violations des droits de l’homme, ou encore celui des cas dans lesquels la loi constitue une «violation flagrante des règles de droit international d’importance fondamentale» (par exemple, l’invasion du Koweït par l’Irak en 1990).

En outre, les règlements Rome I et Rome II prévoient désormais l’application des lois de police du for, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat. De telles règles existent et on les trouve généralement dans les domaines de la consommation et du travail ou dans la législation complétant une convention internationale.

2.5 La preuve de la loi étrangère

Le contenu du droit étranger est prouvé comme s’il s’agissait d’un fait. À ce titre, il incombe aux parties de prouver le contenu du droit étranger; les juges ne sont pas autorisés à examiner eux-mêmes le contenu du droit étranger. En cas de conflit entre les preuves soumises par les parties, le juge peut évaluer la crédibilité des experts et est autorisé à examiner les preuves primaires (par exemple, la législation et la jurisprudence étrangères), notamment lorsque ces preuves sont rédigées en anglais et appliquent des concepts qui sont connus d’un juge de Gibraltar.

Le contenu du droit étranger est habituellement prouvé par un témoignage d’expert. Il ne suffit pas de produire devant le tribunal le texte d’une loi ou d’une affaire étrangère, ou un texte faisant autorité. Un témoignage d’expert sur le droit étranger peut être présenté par toute personne «possédant les qualifications appropriées pour le faire, eu égard à ses connaissances ou à son expérience», qu’elle soit habilitée ou non à exercer en qualité de praticien du droit dans la juridiction concernée. Néanmoins, les experts sont généralement des universitaires ou des praticiens dans la juridiction en question. Si le contenu du droit étranger a été déterminé dans une précédente affaire de Gibraltar, ou anglaise, cette décision peut être citée à titre de preuve du contenu du droit étranger, et le contenu du droit étranger sera présumé identique à celui déterminé dans cette affaire, sauf preuve contraire.

La charge de la preuve incombe à la partie qui se fonde sur le droit étranger. Si le droit étranger n’est pas prouvé de manière satisfaisante, la règle générale est que le droit de Gibraltar sera appliqué. Toutefois, lorsque rien ne laisse à penser que le droit étranger ressemble de quelque façon que ce soit au droit de Gibraltar (par exemple, une loi fiscale d’une autre juridiction européenne), la procédure peut être annulée.

3 Les règles de conflit de lois

3.1 Les obligations contractuelles et les actes juridiques

Dans tous les cas concernant des obligations contractuelles et impliquant un choix de loi, le règlement Rome I est directement applicable. Les règles de conflit de lois du règlement Rome peuvent également s’appliquer aux cas qui ne sont pas reconnus par le droit interne de Gibraltar comme étant de nature contractuelle (par exemple, lorsque le contrat ne repose pas sur une contrepartie, comme les contrats de donation).

Les questions relatives à la procédure sont déterminées par la loi du for. Par conséquent, l’appréciation du niveau de dommages (et non des chefs de dommage) et des moyens de preuve est régie par la loi du for. Les délais de prescription sont des délais de fond et, par conséquent, dans le cas des obligations contractuelles, ils sont déterminés par la loi applicable en vertu du règlement. Les principales règles de fond sont les suivantes.

Lorsque les parties ont expressément choisi la loi d’un pays, ou que ce choix peut être démontré de façon certaine, cette loi s’applique. Un choix est susceptible d’être démontré de façon certaine lorsque le contrat est un contrat type que l’on sait régi par un droit particulier (par exemple, une police d’assurance maritime des Lloyd’s), ou compte tenu des relations antérieures entre les parties. L’existence d’un accord d’élection de for est souvent un motif suffisant pour déduire que les parties avaient l’intention de choisir la loi de cette juridiction, mais ce n’est pas toujours le cas. Dans le cas d’un accord d’arbitrage, si les critères de sélection des arbitres sont précisés, il sera plus facile de déduire un choix de loi, mais si les arbitres sont identifiés par une référence à un organisme international, il est peu probable que ce choix puisse être démontré de façon certaine.

La liberté de choix est circonscrite à plusieurs égards. Premièrement, dans les contrats de consommation et de travail, le choix de loi ne peut pas priver le consommateur ou l’employé de la protection des règles impératives qui existent en vertu de la loi qui, en l’absence d’un choix exprès de loi, se serait appliquée à l’espèce. Deuxièmement, lorsque tous les éléments de la situation sont liés à un seul pays, le choix d’une loi différente ne peut pas priver d’effet les règles impératives de ce pays. Il existe également des règles de protection des consommateurs en ce qui concerne les contrats d’assurance. Il convient également de noter qu’en cas de désaccord concernant le caractère effectif du choix (par exemple, en cas d’allégation de contrainte), la question de savoir si ce choix était effectif est déterminée par la loi applicable putative (à savoir la loi qui aurait régi le contrat si le choix était valable), à moins que cela ne soit «déraisonnable» (auquel cas la loi de la résidence habituelle de la partie prétendant ne pas avoir donné son consentement peut être appliquée).

Lorsqu’il n’existe aucun choix exprès de loi, ou lorsque ce choix ne peut être démontré de façon certaine, le règlement Rome I prévoit des règles spécifiques en fonction du type de contrat. Toutefois, lorsque ces règles ne sont pas concluantes, la loi sera généralement celle de la résidence habituelle du prestataire caractéristique. Le prestataire caractéristique n’est pas toujours aisé à identifier, mais il s’agit généralement de la partie qui ne s’acquitte pas du paiement du bien ou du service (par exemple, le prestataire caractéristique est le vendeur d’un produit, le prêteur dans une opération bancaire, le garant dans un contrat de garantie). Cette présomption peut être réfutée en faveur d’un pays avec lequel le contrat présente le lien le plus étroit.

3.2 Les obligations non contractuelles

En ce qui concerne les obligations non contractuelles, le règlement Rome II s’appliquera dans la plupart des cas. La loi ne s’appliquera qu’aux questions liées aux faits dommageables qui ne relèvent pas de ce règlement, et la diffamation continue d’être régie par la common law (voir ci-dessous). Les délais de prescription sont également déterminés par la loi applicable.

En vertu du règlement Rome II, la règle générale consiste à appliquer la loi du lieu où le dommage est survenu. Des règles spécifiques déterminent la loi applicable pour certains types d’obligations non contractuelles, notamment en cas de responsabilité du fait des produits, de concurrence déloyale, de responsabilité environnementale et d’atteinte aux droits de propriété intellectuelle. Le règlement autorise également les parties à choisir la loi applicable dans certaines circonstances, mais cette disposition ne peut pas être utilisée en vue d’éviter des règles impératives du droit de l’Union ou du droit interne. Il convient de noter que l’appréciation des dommages est une matière qui relève de la loi applicable.

Comme indiqué ci-dessus, les actions en diffamation (qui incluent les actions pour discrédit de titre, discrédit de marchandise ou mensonge malveillant et toute action étrangère «correspondant ou s’apparentant d’une autre manière à l’une de ces actions») continuent d’être régies par la common law. Dans de tels cas, la «règle de la double application» (double actionability rule) s’applique: un fait dommageable n’est passible de sanctions à Gibraltar que s’il peut donner lieu à une action civile en vertu du droit étranger de la juridiction dans laquelle le fait s’est produit (généralement une publication) et, si ce fait s’était produit à Gibraltar, que s’il aurait pu donner lieu à une action civile en vertu du droit de Gibraltar. Cette règle a été conservée à la suite de pressions exercées par des organisations de médias qui craignaient l’application de lois étrangères oppressives. Toutefois, cette règle est soumise à une exception: lorsqu’un autre pays a un lien plus significatif avec le fait survenu et les parties, la loi de cette juridiction s’appliquera. Il convient de noter que ce domaine est particulièrement incertain.

En ce qui concerne la gestion des trusts, la loi applicable est régie par la loi sur les trustees (Trustees Act) qui met en œuvre la convention de La Haye relative à la loi applicable au trust. Cette loi prévoit que la loi applicable est celle choisie par le constituant ou, en l’absence d’un tel choix, par le droit avec lequel le trust présente le lien le plus étroit. Cette loi détermine la validité du trust, son interprétation, ses effets et sa gestion.

3.3 Le statut personnel, ses aspects relatifs à l'état civil (nom, domicile, capacité)

À la naissance, le domicile d’un enfant (le domicile d’origine d’une personne) est le même que celui de son père au moment de la naissance de l’enfant, si ce dernier est légitime. Si l’enfant est naturel, ou si le père est décédé au moment de la naissance, le domicile de l’enfant est le même que celui de sa mère. Cette règle continue de s’appliquer jusqu’à ce que l’enfant ait atteint l’âge de 16 ans (à savoir que le domicile de l’enfant change en fonction de celui du père ou de la mère respectivement).

Pour les personnes âgées de plus de 16 ans, le domicile d’origine continue de s’appliquer, à moins qu’elles n’adoptent un domicile de choix. Pour adopter ce domicile, la personne doit réellement résider dans la juridiction concernée et avoir l’intention d’y résider pour une durée indéterminée ou de manière permanente. Si l’une de ces conditions cesse d’exister, le domicile de choix ne s’applique plus et le domicile d’origine s’applique.

Le domicile d’une épouse n’est plus déterminé par référence à celui du mari: il est évalué de manière indépendante.

La capacité d’assumer des obligations particulières (par exemple, de contracter, de tester, de se marier) est déterminée par des règles propres au domaine concerné et est examinée dans les sections correspondantes.

3.4 La filiation et l'adoption

Les questions relatives à la responsabilité parentale et à la protection de l’enfance sont généralement déterminées par le droit de Gibraltar, sauf exceptions limitées telles que celles (examinées ci-dessus) applicables aux matières relevant de la convention de La Haye de 1996 et du règlement Bruxelles II bis. Les questions relatives à la légitimité et à l’adoption sont elles aussi généralement déterminées par le droit anglais, sous réserve de certaines exceptions.

3.5 Le mariage, les unions libres, la cohabitation et les partenariats divers, le divorce, la séparation de corps, les obligations alimentaires

La validité formelle d’un mariage est généralement régie par la loi du lieu de célébration du mariage, sous réserve de certaines exceptions.

La capacité des personnes de se marier est généralement déterminée par la loi du domicile des personnes concernées au moment qui précède immédiatement le mariage. Cette loi régit les questions liées, entre autres, au consentement des parties, aux conditions d’âge et aux membres de la famille «élargie» qu’il n’est pas possible d’épouser. Pour ce qui est en particulier de l’âge, aucun mariage ne sera valable si l’un des mariés était âgé de moins de 16 ans à la date du mariage, et ce si les mariés sont domiciliés à Gibraltar. Cependant, un mariage peut être contracté en cas de demande préalable d’autorisation de mariage.

En matière de divorce ou de séparation, le droit de Gibraltar sera généralement appliqué, sauf exceptions limitées.

Pour ce qui est des obligations alimentaires, c’est généralement le droit de Gibraltar qui s’applique, sauf certaines exceptions.

3.6 Les régimes matrimoniaux

Le régime matrimonial n’est pas une notion généralement connue dans la common law. En matière de compensation financière en cas de divorce, de séparation ou de nullité, ou en matière d’obligations alimentaires, les tribunaux de Gibraltar appliqueront généralement la jurisprudence de l’Angleterre et du pays de Galles, sauf exceptions limitées.

3.7 Les testaments et successions

Dans le cas des successions ab intestat (à savoir en l’absence de testament), la loi du domicile du testateur au moment du décès s’applique à la succession mobilière; la loi de la juridiction dans laquelle le bien est situé (loi du lieu de situation) s’applique à la succession immobilière.

Dans les cas impliquant des testaments (succession testamentaire), la capacité du testateur de disposer par testament de biens meubles est déterminée par la loi du domicile du testateur à la date du testament. Un légataire aura la capacité de recevoir des biens meubles s’il en est capable selon la loi de son propre domicile ou de celui du testateur. Il n’existe pas d’autorité spécifique en ce qui concerne la situation des biens immeubles, mais la loi du lieu de situation serait l’issue la plus probable et déterminerait probablement aussi la capacité d’un légataire de recevoir un legs de biens immeubles.

Conformément à la loi de 2009 sur les testaments (Wills Act 2009), un testament est formellement valable (par exemple, nombre requis de témoins) s’il est conforme à l’une des lois suivantes: la loi du lieu où le testament a été rédigé (à savoir généralement le lieu où il est signé devant témoins) au moment de sa rédaction; la loi du domicile, de la résidence habituelle ou de la nationalité du testateur au moment de la rédaction du testament; la loi du domicile, de la résidence habituelle ou de la nationalité du testateur au moment du décès. Un testament sera également formellement valable en cas de transmission de biens immeubles s’il est conforme au droit interne de la juridiction dans laquelle les biens en question sont situés (excluant de ce fait l’application du renvoi, en dépit de son application aux biens immeubles).

Un testament portant sur des biens meubles est valable sur le plan matériel (par exemple, restrictions quant au montant qu’il est possible de léguer en vertu d’un testament) s’il est conforme à la loi du domicile du testateur au moment du décès; un testament portant sur des biens immeubles est valable sur le plan matériel s’il est conforme à la loi de la juridiction dans laquelle les biens sont situés, c’est-à-dire quel que soit le système de droit interne que la loi du lieu de situation appliquerait.

Un testament est interprété par la loi prévue par le testateur, laquelle est présumée être la loi de son domicile à la date du testament. Cette présomption est une règle prima facie qui peut être réfutée en prouvant que le testateur envisageait et souhaitait manifestement que ce testament soit interprété en vertu d’un autre système de droit. S’agissant des biens immeubles, il peut y avoir une restriction supplémentaire par laquelle, si l’intérêt qui découle d’une telle interprétation n’est pas autorisé ou n’est pas reconnu par la loi du lieu de situation, cette dernière loi prévaut.

La validité d’une révocation alléguée d’un testament est déterminée par la loi du domicile du testateur au moment de la révocation alléguée (il convient de noter que, en vertu du droit interne de Gibraltar, si cette règle s’applique, un mariage révoque un testament, à moins qu’il ne soit démontré que le testament a été expressément rédigé dans la perspective du mariage). Toutefois, lorsque la révocation est présumée résulter d’un testament ultérieur (et non, par exemple, de la destruction du testament), la question de savoir si ce deuxième testament révoquera le premier est déterminée par les lois applicables à la validité formelle du deuxième testament. En cas d’incertitude quant à savoir si un deuxième testament révoquera un premier testament, la question de l’interprétation sera déterminée par la loi prévue par le testateur, laquelle est présumée être la loi de son domicile à la date du deuxième testament.

3.8 La propriété immobilière

En matière de propriété, les biens sont divisés en biens meubles et immeubles; la question de savoir si un bien est meuble ou immeuble relève de la loi du lieu où le bien est situé.

Dans le cas de biens immeubles, la loi applicable est celle du lieu où le bien est situé, et le renvoi s’applique. Cette règle s’applique à toutes les questions relatives à la transaction, y compris la capacité, les formalités et la validité matérielle. Il convient de noter qu’il existe naturellement une distinction entre le transfert de terrains ou d’autres biens immeubles et le contrat qui régit les droits et responsabilités des parties à ce transfert [ce dernier est régi par des règles distinctes de la loi applicable (en particulier, en vertu du règlement Rome I)].

Dans le cas des questions liées à la propriété (par opposition aux questions contractuelles) concernant le transfert de biens meubles corporels, la loi applicable est généralement celle du lieu où le bien était situé au moment de l’évènement qui est censé avoir affecté sa propriété. Des doutes subsistent quant à l’application du renvoi dans cette situation, et les effets généraux des décisions de première instance des tribunaux de Gibraltar laissent penser le contraire. Le titre de propriété de biens meubles corporels acquis conformément à cette règle générale sera reconnu comme valable à Gibraltar si les biens meubles sont ensuite déplacés hors du pays dans lequel ils étaient situés au moment de l’acquisition du titre, aussi longtemps que ce titre n’est pas remplacé par un nouveau titre acquis conformément à la loi du pays vers lequel les biens ont été déplacés. Une exception particulière à la règle générale sur les biens meubles corporels concerne le cas dans lequel, lorsque le bien meuble corporel est en transit et que son lieu de situation n’est pas connu des parties, ou est temporaire, un transfert qui est valable en vertu de la loi applicable au transfert sera effectif à Gibraltar.

Dans le cas de la cession de biens meubles incorporels, lorsque la relation entre le cédant et le cessionnaire est de nature contractuelle (comme dans le cas de la plupart des dettes) et que la question ne porte que sur la validité et l’effet de la cession elle-même, le règlement Rome I s’applique.

Il convient de noter que les règles de conflit de lois sur la cession et le transfert de biens incorporels sont difficiles à résumer et qu’aucune règle de conflit de lois ne couvre à elle seule ces biens, principalement parce que la catégorie des biens incorporels recouvre un très large éventail de droits, qui ne sont pas tous d’origine contractuelle. Il est recommandé de solliciter l’avis d’experts dans le cas de biens meubles incorporels.

3.9 La faillite

Le Royaume-Uni et, par extension, Gibraltar sont parties au règlement (CE) nº 1346/2000 du Conseil relatif et aux procédures d’insolvabilité, qui énonce les règles applicables aux procédures d’insolvabilité qui entraînent le dessaisissement partiel ou total du débiteur ainsi que la désignation du syndic lorsque les intérêts principaux du débiteur sont situés dans un État membre de l’UE (autre que le Danemark). Si les tribunaux de Gibraltar sont compétents (ce qui sera le cas si le centre des intérêts principaux du débiteur est situé à Gibraltar, lieu présumé du siège social), le droit de Gibraltar s’appliquera.

Dans les cas ne relevant pas du règlement (CE) nº 1346/2000, le droit de Gibraltar s’appliquera lorsque les tribunaux de Gibraltar seront compétents (ce qui sera le cas si la société est enregistrée à Gibraltar, ou si des personnes à Gibraltar bénéficient de la liquidation et qu’il n’existe aucun motif valable de décliner la compétence).

Dernière mise à jour: 08/06/2021

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